Comment l'Etat racle les fonds de tiroir des communes...
Pour redresser les comptes publics, l'Etat ne se contente plus de baisser les dotations aux collectivités locales. Il demande maintenant à certaines de lui verser de l'argent.
Imaginez la scène. Pour sauver son entreprise, un patron impose à ses employés une baisse de salaire. Comme la situation ne s'améliore pas, il renouvelle ce tour de vis, l'amplifie pendant plusieurs années... jusqu'à réclamer de l'argent à ses salariés ! Impensable ? C'est pourtant, peu ou prou, ce que fait vivre l'Etat à 167 maires et 174 présidents d'intercommunalité. Non seulement, au nom de la réduction des déficits publics, on ne leur verse plus aucune subvention — les dotations — mais, désormais, ces collectivités sont même priées de mettre la main à la poche pour alimenter les caisses de Bercy.
Alors, certes, au regard du déficit public (77 MdsEUR), les sommes en jeu sont mineures : 38 M€ directement ponctionnés sur les impôts locaux. Mais le symbole est marquant, la logique s'inverse : l'Etat ne donne plus aux communes, il leur prend. Luberon, Saint-Tropez, Rungis, Flamanville, Porcheville, Roissy... En plein été, le ministère des Finances a publié dans le « Journal officiel » la liste de ces collectivités qui lui doivent de l'argent.
Pourquoi leur réserve-t-on ce traitement spécial ? Parce qu'elles sont, justement, pour la plupart d'entre elles, hors norme. Grâce à une population plutôt aisée ou à la présence de grandes industries sur leur territoire, elles sont, selon le gouvernement, opulentes.
6 Mds€ de baisse de dotations
Riches et peu peuplées, elles n'ont donc, aujourd'hui, plus ou presque plus d'aides de l'Etat. Or, le gouvernement a prévu 6 Mds€ de baisse de dotation pour les communes et communautés de communes, diminution étalée sur 2015, 2016 et 2017.
Comment continuer à baisser les subventions à celles qui n'en touchent déjà plus ? En les faisant payer. La boucle est bouclée. « Cette mesure a fait débat entre les maires », reconnaît Philippe Laurent (UDI), maire de Sceaux (Hauts-de-Seine) et secrétaire général de l'Association des maires de France (AMF). Comme lui, nombre d'élus locaux en sont pourtant arrivés à la conclusion que cette mesure baroque introduit de la « justice » entre elles. Comme l'explique un porte-parole de France urbaine, une association de grandes villes : « Sans ce système, ces collectivités ne contribueraient plus aux économies réclamées par l'Etat quand d'autres, plus pauvres, mais qui ont encore des dotations, poursuivraient les efforts financiers ! »
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